Paris 20e


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Dossier : les sources du Nord
Splendeur et décadence

Les acqueducs de Belleville et des Savies n'ont jamais eu un débit très important. La rigole d'écoulement des eaux creusée au centre de l'acqueduc de Belleville n'a que 5 centimètres de profondeur pour un largeur de 25 centimètres. Eugène Belgrand indique que le débit de l'acqueduc était de 21 mètres cubes en 24 heures en 1874. Même s'il avait perdu à cette époque une partie de son alimentation du fait du manque d'entretien et de quelques destructions, le débit ne devait pas être considérablement supérieur au moyen-âge.


Le regard des Messiers,
rue des Cascades
L'eau n'était pas non plus de grande qualité. Le sable où l'eau est collectée contient par endroits des lentilles de gypse qui se dissout dans l'eau et en altère la qualité, en lui donnant un goût peu agréable et diminuant la solubilité du savon dans l'eau. La fontaine Maubuée alimentée par l'aqueduc des Savies porte un nom évocateur : "maubuée" signifie "mauvaise lessive". L'eau des aqueducs avait néanmoins une qualité bactériologique très supérieure aux eaux des puits ou à l'eau de la Seine qui étaient largement polluées par les déchets organiques de l'activité humaine. Mais la population et les autorités ne furent sensibles à ce problème qu'à partir du 19e siècle.

L'eau de ces aqueducs avait surtout une qualité : elle coulait toute seule de la source aux points de distribution sans qu'il soit nécessaire de fournir d'autre travail que l'entretient de l'aqueduc. Les autres sources d'alimentation en eau, les puits ou la Seine, imposaient un travail d'extraction et de transport réalisé soit manuellement, soit à partir du 16e siècle, à l'aide de machines. Cette facilité de transport des eaux des sources du Nord était bien évidemment déterminante pour l'alimentation des fontaines publiques qui furent jusqu'à la fin du 19e siècle la principale source d'approvisionnement des parisiens.

Les dimensions des ouvrages, regards et aqueducs, et la qualité de leur finition est en rapport avec l'importance qui était accordée aux sources du Nord. Ainsi, l'aqueduc de Belleville a 1,72 mètre de hauteur alors que la hauteur d'eau qui s'y écoulait n'était que de quelques centimètres. Ces ouvrages étaient visités tous les ans pour vérifier leur état de fonctionnement et prévoir les travaux d'entretien.

Les sources du Nord perdirent un peu de leur importances lorsque plusieurs machines furent installées sur la Seine pour en extraire l'eau et la distribuer à travers un réseau de conduites. Les premières machines fonctionnaient en utilisant l'énergie du courant. Plus tard, on utilisa des machines qui tiraient leur énergie du bois ou du charbon. La construction du canal de l'Ourcq apporta de l'eau en quantité à Paris et un véritable réseau de distribution fut créé. Enfin, les grands travaux pour l'alimentation en eau et l'assainissement réalisés pendant le second empire par Eugène Belgrand sous la direction du Baron Hausmann firent entrer Paris dans l'ère moderne de l'alimentation en eau.

En 1740 l'eau de l'aqueduc de Belleville fut principalement réservé au nettoyage du grand égout de ceinture que Turgot venait de faire construire en canalisant l'eau du ruisseau de Ménilmontant. Mais en 1773, l'eau de Belleville retrouve un usage plus noble en alimetant l'hopital Saint-Louis. En 1832, l'hopital obtient une concession d'eau de l'Ourcq et abandonne l'eau de Belleville, et vendit les terrains ou l'eau était captée. Les ouvrages sont alors abandonnés. Vers 1850, Eugène Belgrand écrit "aujourd'hui on accède [au regard de la Lanterne] par la porte disjointe d'une cloture en planche et en soulevant les cordeaux à sécher le linge que la ménagère du lieu tend au moyen des anneaux de fer scellés autour de l'édifice".

Aujourd'hui le regard de la Lanterne, de St Martin, des Messiers, et de la Roquette sont protégés. Le regard de la Lanterne est visitable lors des journées du patrimoines grace au dévouement des membres d'une association qui propose ces visites et participe à la sauvegarde de ces batiments témoins de près de mille ans d'histoire.

Bibliographie
Travaux souterrains de Paris, volume 3 : Les eaux anciennes, Eugène Belgrand

Commission du vieux Paris, Rapport de M. Tesson, Séance du 6 octobre 1898.

Paris Souterrains, Emile Gerards, 1908, réédité par SIDES en 1991.

L'eau à Paris, Laure Beaumont Maillet, édition Hazan